L’année hydrologique débute après le mois habituel des plus basses eaux. Retour sur l’état des nappes phréatiques au cours de l’année hydrologique 2022-2023, marquée par une sécheresse exceptionnelle.
22 mars 2024

Bilan global de l’année hydrologique 2022-2023

La période de recharge 2022-2023 s’est caractérisée par une succession d’épisodes humides, engendrant des recharges, et d’épisodes secs. Les tendances ont alors alterné entre baisse et hausse. Durant l’automne et l’hiver, les pluies ont été peu efficaces pour la recharge des nappes, du fait d’une végétation active tardivement et de sols très secs après chaque épisode de sécheresse météorologique. Les pluies de fin d’hiver (mars) et du début du printemps (avril) ont permis d’engendrer des épisodes de recharge et de repousser le début de la période de vidange sur les secteurs les plus arrosés. Du fait d’un étiage 2022 très sévère sur une majorité des nappes et d’une recharge 2022-2023 peu intense, la situation des nappes était peu satisfaisante en fin de période de recharge, sauf sur les nappes réactives à mixtes du littoral d'Artois-Picardie, de la façade atlantique et de la Corse.

La période de vidange 2023 s’est progressivement mise en place entre mars et mai. Durant le printemps et l’été 2023, les périodes sèches et humides ont continué à se succéder. Les pluies ont pu être suffisantes pour s’infiltrer en profondeur, générer des épisodes de recharge et soutenir les niveaux. L’impact observé sur les nappes dépendait alors des cumuls pluviométriques et de la réactivité de la nappe. Ainsi, les situations ont pu s’améliorer au droit des secteurs arrosés abritant des nappes réactives ou se stabiliser sur les secteurs moins arrosés et sur les nappes inertielles. L’effet des précipitations sur les nappes s’est cependant atténué en avançant dans la saison estivale. A l’automne, lors de l’étiage 2023, la situation des nappes était très hétérogène, selon les cumuls pluviométriques locaux enregistrés entre l’automne 2022 et l’été 2023 et selon la cyclicité de la nappe.

Situation en début d’année hydrologique

Les plus basses eaux 2022 ont été enregistrées entre mi-août 2022 et janvier 2023, avec parfois 2 voire 3 mois de retard. En détail, les basses eaux des nappes les plus réactives ont été observées entre mi-août et fin-novembre 2022. De nombreuses nappes réactives à mixtes de l’est du territoire ont atteint l’étiage entre mi-août et mi-septembre, les premiers orages de fin d’été ayant stoppé la baisse des niveaux : nappe alluviale de la plaine d’Alsace, nappes des calcaires jurassiques du Berry, de la Côte-des-Bars et du Jura, nappes de l’est du Massif Central, nappes alluviales du Rhône, de la Saône et des vallées alpines, nappes du Languedoc et nappes alluviales de Corse. L’étiage a été décalé à novembre 2022, soit avec plusieurs semaines de retard, sur les nappes réactives de l’ouest : nappes du socle de la Bretagne à la Vendée, nappes des calcaires du seuil du Poitou aux Causses du Quercy et nappes du socle du Limousin. Concernant les nappes plus inertielles, les plus basses eaux ont eu lieu entre novembre 2022 et janvier 2023 sur les nappes du Bassin parisien et entre novembre 2022 et mi-décembre 2022 sur les nappes du couloir Rhône-Saône. 

La situation à l’étiage 2022, en début d’année hydrologique 2022-2023, était peu satisfaisante. Les niveaux étaient majoritairement en-dessous des normales. Les déficits pluviométriques enregistrés sur l’année hydrologique 2021-2022 et la forte sollicitation des eaux souterraines durant le printemps et l’été 2022 ont engendré un étiage sévère sur une majorité des nappes. L’étiage 2022 s’est avéré le plus intense jamais enregistré sur certaines nappes. A titre d’exemple, les sources des calcaires karstiques du Vaucluse et du centre Var se sont retrouvées en phase de tarissement. La nappe des alluvions et formations tertiaires du Var s’est déconnectée des eaux superficielles et n’a alors plus joué son rôle de régulateur de débit pour le cours d’eau. Seules quelques nappes ont conservé des niveaux comparables à la moyenne, notamment les nappes alluviales de la Garonne, de la Dordogne et de leurs principaux affluents.

Situation des nappes d'eau souterraine à l’étiage 2022.

Situation des nappes d'eau souterraine à l’étiage 2022.

L’indicateur Standardisé des Niveaux Bas (avant la recharge hivernale), ou ISN-B, traduit l’écart à la moyenne (normale) des niveaux journaliers minimums atteints en fin de période de décharge. Cet indice permet un classement des niveaux journaliers de basses eaux des nappes (de très bas à très hauts) par rapport aux niveaux journaliers de basses eaux enregistrés sur la période de référence 2001-2023.

Selon le type de nappes (inertielles/réactives) et les secteurs (en lien avec la pluviométrie, l’activité de la végétation et les volumes prélevés), les basses eaux ne surviennent pas à la même date. L’ISN-B ne permet pas de visualiser l’état des nappes à une date ou un mois donné mais représente les niveaux journaliers des basses eaux, atteints avant la période de recharge.

Carte établie le 5 janvier 2023 par le BRGM, à partir de données acquises jusqu’au 23 décembre 2023. Source des données : ADES (ades.eaufrance.fr) / Hydroportail (hydro.eaufrance.fr) / Fond de carte © IGN.

Producteurs de données et contribution : APRONA, BRGM, Conseil Départemental de la Vendée, Conseil Départemental des Landes, Conseil Départemental du Lot, EPTB Vistre Vistrenque, Parc Naturel Régional des Grandes Causses, Syndicat Mixte d’Etudes et de Travaux de l’Astien (SMETA), Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes souterraines de la plaine du Roussillon (SMNPR).

© BRGM

Analyse de la période de recharge 2022-2023

Les nappes sont alimentées principalement durant l’automne et l’hiver car la pluviométrie est généralement plus abondante, l’évaporation est faible et la végétation reste peu active et ne prélève pratiquement pas d’eau dans les sols. La hausse des niveaux dépend de la durée potentielle de la recharge et l’importance des précipitations durant cette période.

L’impact de la pluie efficace sur la nappe (temps de réponse et variation des niveaux) est conditionné par l’épaisseur et la nature des terrains traversés. Le temps de réponse peut être de quelques jours pour une nappe réactive (alluvions, sables, calcaires karstiques crétacés et jurassiques, formations de socle) et de plusieurs semaines pour une nappe inertielle (craie crétacée, sables et calcaires éocènes d’Artois-Picardie et du Bassin parisien ainsi que formations miocènes, plio-quaternaires et fluvio-glaciaires des plaines situées à l’est du Rhône et de la Saône). Les niveaux des plus hautes eaux, observés en fin de période de recharge, sont en général enregistrés entre mars et mai.

Evolution de la recharge des nappes

La période de recharge 2022-2023 a été marquée par une succession d’épisodes de recharge et de périodes sèches. Les orages de fin d’été 2022, entre mi-août et mi-septembre, ont pu entrainer de petites recharges ponctuelles sur les nappes réactives à mixtes de la moitié est du territoire. Durant l’automne et le début d’hiver, la part des pluies infiltrées en profondeur est restée faible. La recharge s’est amorcée avec difficulté sur de nombreuses nappes puis est restée peu active. Plusieurs éléments expliquent ce constat. Tout d’abord, les pluies survenues à partir de mi-septembre 2022, ont bénéficié à l’humidification des sols très secs et à la végétation. Ensuite, la végétation est restée active très tardivement, jusqu’à début novembre 2022, du fait de températures douces. Enfin, la pluviométrie a été déficitaire sur la fin de l’automne et le début de l’hiver. La recharge a été bien active fin décembre 2022 et en janvier 2023 mais elle s’est stoppée brutalement en février 2023, du fait de l’arrêt des apports pluviométriques. Les pluies de fin d’hiver et de début du printemps 2023 (mars-avril) ont engendré des épisodes de recharge sur les secteurs les plus arrosés. Ces pluies ont permis de repousser le début de la période de vidange et ont amélioré les situations notamment des nappes réactives. Seules les nappes du sud-est n’ont pas bénéficié de ces apports complémentaires.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres d'août 2022 à mai 2023.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres d'août 2022 à mai 2023.

© BRGM

Bilan de la recharge des nappes

L’automne et l’hiver 2022-2023 se sont caractérisés par une période de recharge peu intense. La recharge a été déficitaire sur plus de la moitié des points d’observation. Elle a notamment été très faible sur les nappes inertielles à mixtes du centre du Bassin parisien, du couloir de la Saône et du Rhône moyen (du Dijonnais au Nord-Isère) et de la Plaine de la Limagne. Les nappes du Languedoc et du Roussillon ont également subi une recharge déficitaire, les cumuls pluviométriques étant insuffisant. Certains piézomètres du centre du Bassin parisien et de la plaine du Roussillon n’ont pas enregistré d’épisodes de recharge et sont restés en baisse ou stables.

Une recharge excédentaire a été enregistrée sur les nappes de la façade maritime des Flandres au Pays Basque, ainsi qu’en Corse. A noter que la recharge globale sur la nappe de la craie séno-turonienne de Normandie et de Picardie est déficitaire, moyennant une recharge excédentaire sur le littoral à inexistante à l’est. Les pluies infiltrées de mars et avril 2023 ont permis de compenser les déficits des mois précédents sur les nappes de la façade océanique et du Grand Est.

Bilan de la recharge des nappes d'eau souterraine 2022-2023.

Bilan de la recharge des nappes d'eau souterraine 2022-2023.

L’Indice Standardisé de Recharge apparente, ou ISVS-R, permet de qualifier la hausse de niveau observée durant la période de recharge survenant habituellement entre l’automne (basses eaux) et le printemps (hautes eaux). Il permet de faire une estimation de l’écart par rapport à des conditions de référence (période 2001-2023). Un ISVS-R fort correspond à une recharge hivernale forte, soit excédentaire (favorable à des niveaux hauts) par rapport à celles observées entre 2001 et 2023, et inversement un ISVS-R faible correspond à une recharge hivernale faible, soit déficitaire.

Cette recharge apparente correspond à la variation de stock maximale lors de la phase de recharge, qui inclut la vidange continue de la nappe et les épisodes de recharge continus ou ponctuels. Cet indicateur permet de comparer les variations de stocks entre les différentes années, sur la période de référence 2001-2023, et non de comparer les apports entre les différentes années.

Carte établie le 5 janvier 2023 par le BRGM, à partir de données acquises jusqu’au 23 décembre 2023. Source des données : ADES (ades.eaufrance.fr) / Hydroportail (hydro.eaufrance.fr) / Fond de carte © IGN.

Producteurs de données et contribution : APRONA, BRGM, Conseil Départemental de la Vendée, Conseil Départemental des Landes, Conseil Départemental du Lot, EPTB Vistre Vistrenque, Parc Naturel Régional des Grandes Causses, Syndicat Mixte d’Etudes et de Travaux de l’Astien (SMETA), Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes souterraines de la plaine du Roussillon (SMNPR).

© BRGM

Situation des nappes en fin de période de recharge

Le pic de crue le plus important est survenu courant janvier 2023 sur les nappes réactives de la moitié nord et du sud-est. Les apports de fin d’hiver ont permis d’observer ces plus hautes eaux en mars sur le sud-ouest. Concernant les nappes inertielles, les plus hautes eaux ont été enregistrées entre avril et mai sur le Bassin parisien et se sont échelonnées entre mi-janvier et fin mai sur le couloir Rhône-Saône. A noter que ces plus hautes eaux n’ont pas toujours correspondu à la fin de période de recharge 2022-2023, puisque des pluies survenues au printemps ont pu permettre d’engendrer de nouvelles recharges.

La situation observée en fin de période de recharge 2022-2023, lors des plus hautes eaux, dépendait de la situation lors de l’étiage 2022, du bilan de la recharge 2022-2023 et de la cyclicité de la nappe. Les pluies infiltrées durant la période de recharge ont été très insuffisantes pour compenser les déficits accumulés durant l’année hydrologique 2021-2022 et améliorer durablement l’état des nappes. En conséquence, plus des trois-quarts des nappes affichaient des niveaux de plus hautes eaux 2023 sous les normales avec de nombreux secteurs affichant des niveaux bas à très bas.

Les nappes réactives, à cyclicité annuelle, sont sensibles aux pluies infiltrées, du fait d’écoulements rapides au sein du sous-sol. Les secteurs ayant bénéficié de plusieurs épisodes de recharge excédentaire présentaient des niveaux comparables à au-dessus des normales en fin de période de recharge. Il s’agit principalement des nappes réactives à mixtes du littoral d'Artois-Picardie, de la façade atlantique et de la Corse. La faible recharge a fortement impacté les autres nappes réactives pour lesquelles les niveaux sont alors restés sous les normales. Ces niveaux atteignaient des niveaux préoccupants, très bas, sur les nappes de la Limagne et du littoral méditerranéen.

Les nappes inertielles, à cyclicité pluriannuelle, ont une résistance importante à l’absence de pluviométrie. Elles ont été peu impactées par la recharge 2022-2023 déficitaire et leur état est resté stable ou s’est dégradé d’une classe entre les basses eaux 2022 et les hautes eaux 2023. Ainsi, les nappes inertielles du Bassin parisien et du couloir Rhône-Saône ont enregistré des niveaux de hautes eaux 2023 modérément bas à bas. Les niveaux des nappes des cailloutis plio-quaternaires et miocènes du Sundgau (sud Alsace), du Dijonnais, de la Bresse et de la Dombes étaient très bas et plus préoccupants. Seule la nappe de l’Avant-Pays savoyard observait des niveaux satisfaisants, comparables aux normales, en sortie de période de recharge.

Situation des nappes d'eau souterraine en hautes eaux 2023.

Situation des nappes d'eau souterraine en hautes eaux 2023.

L’indicateur Standardisé des Niveaux Hauts (après la recharge hivernale), ou ISN-H, traduit l’écart à la moyenne (normale) des niveaux journaliers maximums atteints en fin de période de recharge. Cet indice permet un classement des niveaux de journaliers de hautes eaux des nappes (de très bas à très hauts) par rapport aux niveaux journaliers de hautes eaux enregistrés sur la période de référence 2001-2023.

Selon le type de nappes (inertielles/réactives) et les secteurs (en lien avec la pluviométrie et l’activité de la végétation), les hautes eaux ne surviennent pas à la même date. L’ISN-H ne permet pas de visualiser l’état des nappes à une date ou un mois donné mais représente les niveaux journaliers des hautes eaux, atteints en fin de période de recharge.

Carte établie le 5 janvier 2023 par le BRGM, à partir de données acquises jusqu’au 23 décembre 2023. Source des données : ADES (ades.eaufrance.fr) / Hydroportail (hydro.eaufrance.fr) / Fond de carte © IGN.

Producteurs de données et contribution : APRONA, BRGM, Conseil Départemental de la Vendée, Conseil Départemental des Landes, Conseil Départemental du Lot, EPTB Vistre Vistrenque, Parc Naturel Régional des Grandes Causses, Syndicat Mixte d’Etudes et de Travaux de l’Astien (SMETA), Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes souterraines de la plaine du Roussillon (SMNPR).

© BRGM

Analyse de la période d’étiage 2023

D’une manière générale, la baisse estivale des niveaux est liée à une faible pluviométrie, à une forte évapotranspiration et/ou à l’activité de la végétation ainsi que de plus fortes sollicitations des eaux souterraines sur certains secteurs (pompages). Généralement à partir de mi-printemps et jusqu’en automne, les pluies s’infiltrant dans le sol sont entièrement reprises par la végétation. La sécheresse météorologique ou la pluviométrie n’ont alors que peu d’influence sur les niveaux des nappes. Les conditions pour observer des niveaux en hausse et une amélioration de la situation des nappes sont une pluviométrie importante, des sols humides et une végétation peu active. Des épisodes pluvieux abondants ne peuvent avoir un effet observable qu’essentiellement sur les nappes réactives, se traduisant par un ralentissement de la décharge des nappes voire une augmentation souvent temporaire des niveaux. Ces apports ponctuels ont alors un effet bénéfique, car ils permettent de repousser le début de la période de vidange au printemps ou de soutenir les niveaux en été. Durant la période de décharge, la baisse des niveaux peut être fortement accélérée sur les secteurs connaissant une forte sollicitation (prélèvements) de la ressource en eaux souterraines.

A la fin de la période de décharge, la nappe atteint son niveau le plus bas de l’année : cette période s’appelle l’étiage ou période de basses eaux. Ces niveaux d’étiage sont généralement observés au cours des mois d’octobre à novembre. Mais ils peuvent être plus précoces au droit des nappes réactives et survenir avec les orages de fin d’été, dès fin août ou courant septembre, qui marquent le début de la recharge.

Evolution de la vidange des nappes

Durant le printemps et l’été 2023, se sont succédées des périodes humides, pouvant engendrer des épisodes de recharge, et des périodes sèches, durant lesquelles la vidange était active. Les pluies ont ponctuellement été suffisantes pour générer des recharges et soutenir les niveaux. L’impact des précipitations sur les nappes s’est cependant atténué en avançant dans la saison estivale. En effet, avec la reprise de la végétation et la hausse des températures, les pluies infiltrées ont tout d’abord permis d’humidifier les sols et d’alimenter la végétation. Les précipitations ont donc été bénéfiques pour les nappes uniquement sur les secteurs suffisamment arrosés pour répondre à ces besoins et ainsi garantir une infiltration des pluies en profondeur.

Concernant les nappes réactives à mixtes, les tendances et la situation des nappes ont évolué durant le printemps et l’été 2023 selon les épisodes de recharge et les périodes de vidange. Au début du printemps, les niveaux étaient en hausse et la situation s’est considérablement améliorée sur les nappes du tiers nord du territoire (Massif armoricain, littoral de la Manche et Grand-Est), grâce aux pluies de mars et surtout d’avril. Sur le tiers sud, les pluies de mai ont permis d’humidifier les sols et d’alimenter la végétation et les pluies de juin ont ainsi pu s’infiltrer en profondeur. Leur impact a été cependant contrasté sur les nappes, selon les cumuls pluviométriques locaux. En juillet et août, les précipitations sur le tiers nord de la France ont permis d’engendrer des niveaux stables ou en hausse courant août. Cet épisode de recharge est cependant resté limité mais a permis de soutenir les niveaux des nappes. De plus, les pluies ont permis une diminution plus ou moins significative de l’irrigation et d’alléger ainsi la pression sur les ressources en eau souterraine.

Les niveaux des nappes inertielles sont restés en baisse durant tout l’été 2023 et l’état des nappes s’est dégradé très lentement. Les pluies du printemps et de l’été n’ont eu que peu d’effet. Ce constat est habituel, ces nappes étant peu sensibles aux événements météorologiques en période estivale. Cependant, concernant les nappes inertielles du Bassin parisien et de l’Artois, bien que les pluies abondantes de juillet et août aient été insuffisantes pour permettre d’inverser la tendance, elles ont permis de fortement ralentir la vidange.

Sur le pourtour méditerranéen, les pluies infiltrées en profondeur durant le printemps et l’été 2023 ont été insuffisantes pour combler les déficits enregistrés depuis début 2022. Les pluies abondantes de mai et de juin ont été peu bénéfiques pour les nappes. En effet, les précipitations ont été inégalement réparties et sont tombées lors d’épisodes orageux parfois violents, peu propices à une infiltration dans le sous-sol. De plus, les températures élevées ont favorisé l’évapotranspiration et accru le besoin en eau des plantes. Ces pluies ont toutefois permis d’enregistrer des pics de crue et d’améliorer les situations sur les nappes de Provence. Plusieurs nappes sont demeurées en tension avec des niveaux bas à très bas persistants durant tout l’été : nappes de la plaine du Roussillon, nappes du littoral du Languedoc et de la Côte d’Azur. Sur les nappes du Roussillon, les restrictions sur l’usage des eaux souterraines ont permis de ne pas dégrader une situation déjà très préoccupante.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres de mars à novembre 2023.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres de mars à novembre 2023.

© BRGM

Situation des nappes en fin de période de vidange

L’étiage 2023 (plus basses d’eaux) a été enregistré un peu tardivement, durant la seconde quinzaine d’octobre, sur les nappes réactives et mixtes et s’est échelonné entre fin octobre et mi-décembre pour les nappes inertielles. La période de recharge s’est mise en place rapidement et de façon synchrone sur quasiment toutes les nappes. Ce constat s’explique par les précipitations importantes survenues à partir de mi-octobre et en novembre sur la quasi-totalité du territoire. Quelques secteurs ont fait exception : l’étiage a eu lieu entre fin août à mi-septembre sur l’extrême sud-ouest, courant août sur la nappe de la plaine d’Alsace et en décembre pour les nappes du Bas-Rhône. Enfin, les nappes de la plaine du Roussillon et du massif des Corbières étaient toujours en période de vidange en janvier 2024.

La période de vidange se caractérise habituellement par une dégradation progressive de la situation des nappes. Cependant, la décharge 2023 a été atypique, avec plusieurs épisodes de recharge. Ainsi, ces épisodes de recharge se sont traduits par une amélioration ou le soutien de l’état général des nappes réactives et de quelques secteurs des nappes inertielles. La situation des nappes à l’étiage 2023 était très hétérogène, selon les cumuls pluviométriques locaux enregistrés entre l’automne 2022 et l’été 2023 et selon la cyclicité de la nappe.

Concernant les nappes inertielles, les niveaux ont peu évolué entre les hautes eaux et les basses eaux 2023. Ils sont généralement restés sous les normales, de modérément bas à bas. La situation était plus défavorable sur les nappes des formations plioquaternaires et miocènes du Sundgau (sud de l’Alsace) et du Dijonnais, de la Bresse et de la Dombes. Seules les nappes de l’Artois et de l'Avant-Pays savoyard présentaient des niveaux au-dessus des normales. Ces secteurs ont bénéficié de plusieurs épisodes de recharge durant l’été.

Concernant les nappes réactives, la situation était hétérogène. Les niveaux étaient satisfaisants, de modérément bas à modérément hauts, sur l’ouest, en Champagne et de l’Artois à la Nouvelle Aquitaine. Ce constat s’explique par plusieurs épisodes de recharge enregistrés durant le printemps et l’été, qui ont permis d’améliorer ou de maintenir l’état des nappes de ces secteurs. Sur le reste du territoire, les niveaux des nappes réactives étaient modérément bas à bas. La situation restait dégradée sur le pourtour méditerranéen. L’étiage 2023 s’est avéré particulièrement intense sur les nappes de la plaine du Roussillon, des calcaires du massif des Corbières, des alluvions de l’Hérault, de l’Orb et de la Côte-d’Azur. Les cumuls de pluies infiltrées durant l’année hydrologique 2022-2023 sont restés très insuffisants pour compenser les déficits accumulés depuis l’année hydrologique précédente.

Situation des nappes d'eau souterraine à l’étiage 2023.

Situation des nappes d'eau souterraine à l’étiage 2023.

L’indicateur Standardisé des Niveaux Bas (après la décharge estivale), ou ISN-B, traduit l’écart à la moyenne (normale) des niveaux journaliers minimums atteints en fin de période de décharge. Cet indice permet un classement des niveaux journaliers de basses eaux des nappes (de très bas à très hauts) par rapport aux niveaux journaliers de basses eaux enregistrés sur la période de référence 2001-2023.

Selon le type de nappes (inertielles/réactives) et les secteurs (en lien avec la pluviométrie, l’activité de la végétation et les volumes prélevés), les basses eaux ne surviennent pas à la même date. L’ISN-B ne permet pas de visualiser l’état des nappes à une date ou un mois donné mais représente les niveaux journaliers des basses eaux, atteints en fin de période de décharge.

Carte établie le 5 janvier 2023 par le BRGM, à partir de données acquises jusqu’au 23 décembre 2023. Source des données : ADES (ades.eaufrance.fr) / Hydroportail (hydro.eaufrance.fr) / Fond de carte © IGN.

Producteurs de données et contribution : APRONA, BRGM, Conseil Départemental de la Vendée, Conseil Départemental des Landes, Conseil Départemental du Lot, EPTB Vistre Vistrenque, Parc Naturel Régional des Grandes Causses, Syndicat Mixte d’Etudes et de Travaux de l’Astien (SMETA), Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes souterraines de la plaine du Roussillon (SMNPR).

© BRGM